La nullité du licenciement
Le droit du travail protège les salariés contre les licenciements abusifs, et tout particulièrement lorsque la rupture du contrat de travail est directement liée à leur état de santé.
Un licenciement nul, tout comme un licenciement sans cause réelle et sérieuse, est considéré comme injustifié. Cependant, la distinction cruciale se trouve dans la gravité du motif. Dans le cas d’un licenciement nul, la raison de la rupture du contrat est si grave que la loi considère l’employeur comme ayant commis une faute, ce qui rend le licenciement susceptible d’être annulé.
Une protection particulière est accordée par la loi aux salariés dont l’état de santé psychologique est altéré, notamment lorsque ces troubles trouvent leur origine dans les conditions de travail.
Les fondements juridiques de la nullité du licenciement en lien avec des troubles psychologiques professionnels
Plusieurs dispositions du Code du travail encadrent la protection des salariés souffrant de troubles psychologiques qui sont les conséquences d’agissements prohibés par la loi. La nullité du licenciement peut être invoquée sur la base des dispositions légales suivantes :
- Le Code du travail protège la victime et le témoin, de bonne foi, de faits de harcèlement moral (article L1152-1 et L1152-2 ). Dès lors, toute rupture du contrat de travail intervenue en méconnaissance de ces dispositions est nul (article L1153-3) ;
- De même, le Code du travail protège la victime et le témoin, de bonne foi, de faits de harcèlement sexuel (article L1153-1 et L1153-2). Ainsi, toute rupture du contrat de travail intervenue en méconnaissance de ces dispositions est également nul (l’article L1153-3) ;
- L’article L1132-1 du Code du travail interdit toute mesure discriminatoire liée à l’état de santé ou au handicap ;
- Les articles L1226-10 du Code du travail et suivants prévoit une protection renforcée pour les salariés victimes d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle (AT/MP). Le contrat de travail d’un tel salarié ne peut être rompu que dans des cas très limités : soit en cas de faute grave du salarié, soit en cas d’impossibilité de maintenir le contrat pour un motif étranger à l’AT/MP (article L1226-13). Tout licenciement prononcé en violation de cette protection est nul. Dans le cadre des troubles mentaux liés au travail, le salarié doit obtenir au préalable la reconnaissance de ces troubles en accident du travail ou en maladie professionnelle.
La procédure en nullité du licenciement
Les étapes clés de la procédure en nullité du licenciement sont les suivantes :
- La saisine du Conseil de prud’hommes : le salarié saisit le Conseil de prud’hommes. Il formule une demande en nullité du licenciement par une requête détaillée dans laquelle il expose l’intégralité des faits et griefs à l’encontre de son employeur ;
- Le Conseil de prud’hommes convoque les deux parties pour une audience de conciliation. C’est une étape obligatoire qui a pour but de trouver une solution amiable. Si un accord est trouvé, la procédure s’arrête là. Sinon, l’affaire est renvoyée devant le Bureau de jugement. C’est à ce moment-là que chaque partie présente ses arguments et ses preuves ;
- Les preuves de la faute de l’employeur d’une particulière gravité : le salarié doit réunir toutes les preuves possibles des actes fautifs de l’employeur (témoignages écrits, mails, SMS, documents internes, rapports médicaux, arrêts de travail, courriers adressés à l’employeur, etc.). Le lien avec les troubles psychologiques doit être étayé par des certificats médicaux, des consultations de psychologues, etc.
- Le Conseil de prud’hommes vérifie la réalité et la gravité des faits reprochés à l’employeur et rend sa décision : si la faute est reconnue il prononce la nullité du licenciement du salarié, sinon il rejette la demande du salarié.
Chaque partie à la possibilité de contester de la décision du Conseil de prud’hommes devant la Cour d’appel.
Les conséquences de la nullité du licenciement
Si le Conseil de prud’hommes décide que le licenciement du salarié est nul, les conséquences pour le salarié varient en fonction de sa décision de réintégrer ou non l’entreprise :
Le salarié décide de réintégrer l’entreprise
Bien que le choix de cette option soit fortement improbable en cas de nullité d’un licenciement du fait de fautes de l’employeur ayant provoqué des troubles mentaux au salarié, celui-ci a néanmoins le droit de réintégrer l’entreprise à son poste ou à un poste équivalent en cas de nullité de son licenciement. Si le salarié demande la poursuite de l’exécution de son contrat de travail, il a droit à :
- Une indemnité dont le montant correspond aux salaires dont il a été privé au cours de la période qui s’est écoulée entre la rupture du contrat et sa réintégration ;
- La prise en compte de cette période pour la comptabilisation des jours de congés acquis.
Le salarié décide de ne pas réintégrer l’entreprise
Lorsque le salarié ne demande pas sa réintégration ou que celle-ci est matériellement impossible, il a droit à :
- Une indemnité spécifique d’un minimum de 6 mois de salaire (primes et heures supplémentaires inclues), sans condition d’ancienneté et sans plafond, fixée par le juge en fonction du préjudice subi par le salarié. Cette indemnité spécifique se cumule avec l’indemnité légale ou conventionnelle de licenciement ainsi qu’avec l’indemnité compensatrice de préavis ;
- Des dommages et intérêts complémentaires peuvent être demandés et obtenus par le salarié en réparation du préjudice moral et matériel (hospitalisation, frais, etc.) subi du fait du harcèlement.
- Des indemnités compensatrices de congés payés si elles n’ont pas déjà été versées ;
- Des indemnités de chômage (ARE) le cas échéant ;
- Des sommes diverses éventuellement dues en cas de rupture du contrat (épargne salariale, primes, etc.) si elles n’ont pas déjà été versées ;
- Des documents de fin de contrat de travail s’ils n’ont pas déjà été remis par l’employeur : certificat de travail, attestation France Travail et le reçu pour solde de tout compte.